Mar 292009
 

Ce dimanche 29 mars 2009, Lionel a été invité par Jean-Pierre, professeur de karate shôtôkan à donner un stage de gôjû-ryû, spécialement sur le kata sanchin et les principes sous-jacents. Ainsi donc après un petit trajet Carrières-sur-Seine, Palaiseau, Meaux… nous voici au gymnase dans lequel doit se dérouler le stage. On se fait accueillir très amicalement par Jean-Pierre, le chef des lieux, et il nous présente à sa famille d’entrainement. Jean-Pierre a une requête particulière, il veut étudier sanchin de gôjû-ryû mais aussi se familiariser avec la pratique du karate d’Okinawa et notamment via le gôjû-ryû.

Le matin

On commence rapidement par un échauffement articulaire globalisé notamment par des mouvements d’ondulation de la colonne vertébrale dans le plan coronal et le plan sagittal, car c’est en ce sens qu’est sollicité le corps durant les mouvements de base de gôjû-ryû. Puis vient l’apprentissage des positions du kata, tant au niveau des jambes qu’au niveau des bras. Lionel insiste beaucoup sur le travail de contraction/décontraction.

Puis arrive le travail de la position sanchin, les principes, et surtout les déplacements. Pour comprendre le principe du déplacement en sanchin, Lionel nous fait avancer l’un en face de l’autre, le but est d’avancer d’un bloc, sans se pencher en avant, sans se pencher en arrière, en se déplaçant massivement. Lionel nous montre ensuite les trois demi-tours possibles, et il explique que la façon de faire demi-tour est plus déterminé par la souplesse des articulations que l’école de karate. Tout il est bon, après ça dépend de soi. Un autre travail des jambes est celui de l’application de tsuru-ashi, et donc le jeu consistait d’essayer de planter le partenaire en lui marchant sur le pied. Jeu qui est d’autant plus difficile quand on essaye de ne pas avoir le regard fixé sur les pieds, mais en regardant le partenaire dans sa globalité, et surtout lorsque le partenaire essaye aussi de nous fixer de la même sorte.

Après plusieurs déplacements dans le vide, on passe ensuite aux positions des bras. Lionel insiste sur les mouvements circulaire de hikite, sur le fait de ramener le coude à l’intérieur lors du retour du coup de poing en uchi-uke (position sanchin avec les deux bras pliés). Lionel rappelle alors que uke ne signifie pas blocage, mais que uke vient de ukeru qui avec le kanji 請ける recevoir, accepter. Et accepter, recevoir une attaque ne veut pas forcément dire, la bloquer. Ainsi la rentrée du coude permet de faire une déviation d’une hypothétique attaque plus rapide et plus efficace. De la même façon le retour en hikite circulaire permet de prendre une attaque en la brossant (même principe qu’un ricochet) ce qui permet de l’écarter plus efficacement qu’un mouvement direct frappé. De la même façon lors du demi-tour, le croisement des bras circulaire en allant chercher devant, permet de dévier une attaque plus efficacement, en effet dévier une attaque au dessus du coude (du bras qui attaque) et plus effectif que si l’on prend l’avant-bras (principe des bras de levier). On travaille aussi la façon de tirer le point pour frapper. L’attaque ne se fait pas avec la seule force de l’épaule. EN fait il y a une contraction du trapèze qui tire le point en arrière, puis le trapèze se relâche et le pectoral prend la suite pour lancer le poing. Le poing est serré, bien dur, mais le reste du bras est décontracté. La contraction se fait à l’impact suivit d’une décontraction qui ne ramène pas le bras en hikite. Ainsi Lionel nous parle du fait que les bras délimitent un périmètre de combat, plus les bras sont proches de nous et plus il est facile pour l’adversaire de pénétrer la garde et tirade nous toucher.

Un autre point important est l’apprentissage du double hirate mawashi-uke de la fin du kata. Bien que ce mouvement est un mouvement qu’on retrouve dans de nombreuses écoles d’arts de combat (boxe du singe, viet vo dao, arts okinawaiens issus du Fujian, arts philippins), il a visiblement été assez difficile à appréhender. Il est vrai pour l’avoir expérimenté que lorsqu’on a l’habitude de se focaliser sur un blocage à un seul bras, que chaque techique de blocage et d’attaque se termine par une contraction et une raideur, il est difficile d’appréhender immédiatement, les techniques circulaires doubles.

Une fois les bases de la position comprises et expérimentées, les principes des bras acquis, vient le moment d’appréhender la respiration. Il ne s’agit pas d’une respiration ventrale mais plus d’une respiration diaphragmatique. inspirer en gonflant le ventre et lors de l’expiration  le diaphragme pousse vers les viscères pour les tasser vers le bas afin de bien s’enraciner.

A l’issu de ces petits exercices chacun avait les principes de bases qui font sanchin, ensuite il suffit de connaitre la schéma global du kata pour avoir de quoi travailler plusieurs années. On exécute donc le kata plusieurs fois avant de prendre une pause déjeuner.


Le groupe du matin

L’après-midi

A la demande de Jean-Pierre on reste dans le travail de sanchin.
Pour en apprécier encore plus, on aborde donc quelques principes connexes à sanchin, notamment, le travail du renforcement/endurcissement. Le travail de sanchin avec ses alternances de contractions/décontractions permet en outre de renforcer les tendons (pour un principe déjà expliqué dans mes comptes rendus: bien que les muscles étant contractés, les articulations bougent de façon infime mais elles bougent quand même, car le corps a un balancement naturel, et donc ce sont les tendons qui travaillent. De plus la contractrion du muscle autour de l’os va le stresser et ainsi exciter les ostéoblastes qui vont renforcer l’os). Ainsi nous passons à une phase préparatoire du renforcement et de l’endurcissement en utilisant des frottements, le tout dans un mode proche de kakie ce qui permet en plus de travailler le renforcement, de travailler le relâchement ainsi que les alternances de tirer le bras avec le trapèze et pousser avec le pectorale. Lionel démontre les étapes suivantes avec un kakie enchainant les 6 blocages (shoto-barai, uchi-uke, age-uke, shoto-uke, gedan-barai) en restant au contact et en maintenant une pression. Ces exercices de renforcement font aussi travailler d’autres principes comme le relâchement des épaules dans les frappes. L’étape suivante lorsque le pratiquant bien endurcit et renforcé par le travail de sanchin et des frottements peut alors passer aux percussions: les deux partenaires face à face, percutent leurs avants bras l’un contre l’autre. Bien que cela soit une méthode traditionnelle, Lionel a tendance à prouver qu’il y a plus d’efficacité à travailler en percussion du plat de la main (surface d’impact plus grande) qu’en impact de l’avant bras, ou du tranchant de la main (selon l’exercice).


Sanchin kitae: test du trapèze

Puis on travaille un des grands principes, et une des stratégies principales des arts okinawaiens issus du Fujian: le muchimi. Ainsi un premier exercice aura pour but de garder les avants bras collés contre ceux du partenaire et de le suivre et rester en contact. Il faut essayer de sentir et créer les ouvertures. Le travail de cette façon permet de délier les épaules, décontracter sans se facaliser sur le fait d’encaisser ou de donner un baffe. Une fois les sensations, la fluidité acquise on peut commencer à remplir le vide créé par une ouverture par une belle tarte. On peut aussi augmenter la difficulté en associant avec les frappes des mains, des tentatives de fixer le partenaire en lui marchant sur le pied, ou en frappant carrément du pied.

Un des exemples de travail de relâchement est d’envoyer au partenaire immobile toutes les techniques de mains possibles (zuki, shuto, hirate mawashi uke, nukite, tsuru ken, tora no ken, kumade, …) le plus rapidement possible à différents niveaux mais aussi accompagnées de frappes de jambes. Il faut quand même toucher le partenaire, en transformant les coups en claques. Le partenaires ainsi submergé par une avalanche d’attaques, doit essayer d’être conscient de ce qui se passe, voir de réfléchir au moyen, de s’en sortit, de stopper ce déluge de baffes, griffures, … C’est un travail pour celui qui donne de cardio, de relâchement et de fluidité, et pour celui qui reçoit un travail de mental.

Lorsque les mains ont fait leur oeuvre, il y a aussi le travail du renforcement du tibia et des cuisses. Pour une amenée en douceur, Lionel montre les frottements du pied sur l’arrête tibiale, et les claques sur les cuisses.

Un des travaux de test du kata sanchin est le sanchin-kitae.
voici un exemple de sanchin-kitae, mais en Uechi-ryû. Le kata sanchin est différent mais le principe de test est le même.


Sanchin kitae frappe appuyée sur les fessiers

Lionel rajoute néanmoins le test du centrage du barycentre du polygone de sustentation en poussant légèrement du doigt les reins ou en tirant sur la ceinture.
Un pratiquant dans une bonne position sanchin-dachi ne devrait pas bouger…

Le stage se termine ensuite par quelques répétitions du kata en revenant sur divers points de base et quelques corrections.


Le groupe de l’après-midi

Conclusion

Le stage était intéressant, car Lionel a apporté des informations supplémentaires par rapport à ce qu’il a l’habitude de répéter lors du travail du kata sanchin. Il a montré la différence de stratégie et de pratique entre un karate issu du shorin-ryû et celle des karate issus du Fujian. Servir de serpillère lors d’une démonstration est aussi intéressant car cela permet de sentir ce qu’il y a derrière les techniques, derrière les mots. J’ai pu voir aussi que l’adaptation est souvent difficile entre un karate comme le gôjû-ryû et un karate comme le shôtôkan, tant les principes de base et les stratégies sont différentes, mais l’inverse est vrai aussi. Le travail est l’échange est vraiment enrichissant, et montre aussi que l’on se sent mieux dans telle ou telle pratique. Après c’est à chacun de se faire sa propre opinion en se basant sur ses sensations.

Personnellement je trouve les karate issus du Fujian vraiment intéressant, du fait du panel technique (kyusho, clef, étranglement, projections, sutemi, immobilisation). Mais aussi par leur stratégie de combat: plein contact, travail à distance courte, fluide, avec des frappes rapides mais puissantes, et un travail de renforcement et de qigong. Je retrouve des principes des arts issus du Fujian dans le travail du qwankido, de divers arts martiaux chinois, vietnamiens, mais aussi dans ce que j’ai vu des arts de combat philippins (Arnis, Escrima, Kali), mais aussi indonésiens (Silat).


Muchimi

Un grand merci à l’équipe de pratiquants de shôtôkan de Jean-Pierre, qui, malgrè une pratique avec d’autres objectifs et le fait d’être un peu perdu par la différence de stratégie, ont travaillés avec sérieux et entrain, et ont même acceptés d’expérimenter le statut de serpillère avec Lionel (baffes, low-kick).
Une ambiance studieuse et sérieuse, mais décontractée quand même a accompagné le stage durant cette journée fort enrichissante.


La serpillère, Jean-Pierre et Lionel

Merci à Jean Pierre pour les photos
son site: http://www.allianceask.com/
Les autres photos du stage >ici<

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