Metz, 8h du matin… Sandy, deux gradés de shorin-ryu, et moi nous retrouvons. Nous décollons alors pour la région parisienne. Petit hic au programme, quatre gaillards de plus d’un mètre quatre-vingt dans une petite voiture de la taille d’une 106, c’est galère. Surtout quand le trajet dure plus de 4heures. Donc voilà, direction Nancy, Toul, Saint-Dizier, Vitry-le-François, on rejoint la francilienne, et… bouchon! Sans aucune raison apparente, mais bon, le voyage commence à se faire sentir. Puis A4… et… erreur de périphérique, nous allons en direction de porte d’Italie au lieu d’aller en direction de porte de charenton. Et évidemment sur ce périf… re-bouchon! Demi-tour porte d’Italie (le réflexe pour aller à la poterne des peupliers), puis petite erreur à Charenton. Mais nous retrouvons le dojo de Qwankido à 12h30. Chouette une place juste devant le dojo de Hoang Long.
Après lui avoir dit bonjour, on se dirige vers le restaurant « Le Bambou Vert » pour retrouver quelques-uns des stagiaires et le sensei. Ainsi j’ai le plaisir de revoir Lionel, Patrick, Nicolas et surtout de faire la recontre du maitre du toate: Alain.
Repas sympathique et tellement amusant qu’on a failli en oublier l’heure et arriver en retard au dojo de hoang long
On est en tout et pour tout 18: 5 pratiquants de Qwankido, élèves de Hoang Long, 2 shorin-ryu lorrains (Steeve et Julien), 2 gôjû (Patrick et Nicolas), 1 kyoku/taikiken (Jean-Christophe), 1 NTJ (Sandy), 2 pratiquants de karate du maitre de l’ombres (on ne les nommera points), 1 pratiquante de Soo Bakh Do, 1 pratiquant d’Uechi-ryû (Raphael), 1 pratiquant de savate défense,ex Uechi (Alain), 1 personne que je ne connaissais pas (et dont je n’ai pas eu l’honneur de faire connaissance), 1 non-pratiquant (watashi) et notre gruesque sensei. On commence par les échauffements des divers groupes articulaires mis en jeu pour la pratique sans oublier de travailler des muscles des yeux.
Vient ensuite le travail spécifique de la préparation au combat dans les styles okinawaiens.
Comme l’avait expliqué maître Shimabukuro, en Uechi-ryû, la stratégie de combat est du combat rapproché, de ce fait on ne peut pas protéger toutes les parties de son corps, il convient alors de renforcer les parties que l’on ne protégèra pas (ventre, poitrine, jambes et bras) pour protéger celle qui doivent être protéger (entrejambe, tête). Ainsi on verra le renforcement de diverses parties du corps.
renforcement des tibias par frottement
Mais ce n’est pas un renforcement unidirectionnel. On renforce certaines parties du corps, pour trois raisons:
1) pour pouvoir encaisser et ainsi permettre à notre partenaire de se lacher et de travailler
2) on renforce pour pouvoir ne pas être indisposé par la douleur lors d’un combat et de pouvoir enchainer sans se soucier d’une frappe
3) on renforce pour transformer l’endroit en arme… un avant-bras renforcé sera plus efficace à la frappe qu’un avant-bras qui n’a pas l’habitude de percuter.
Lionel nous montre que le renforcement à l’okinawaienne n’est pas simplement qu’un execercice sado-maso destiné à se faire mal. On se fait mal, certes, mais c’est pour la bonne cause. Un renforcement effectué en douceur permet de respecter le corps.
Le principe est de stresser les os afin d’exciter les ostéoblastes pour que ceux-ci se protègent en augmentant la calcification (par ponction de calcium dans le sang). Le stress vient d’un travail en contraction, puis en frottement avant de passer aux percussions. Aller trop vite en besogne aura pour but de renforcer le périoste (pour protéger l’os). Seulement le périoste va tirer le calcium des os et donc les fragiliser. Une fois la période de stress interrompue, le périoste va perdre sa calcification et rendre l’os plus affaibli qu’il ne l’était.
Dans un premier temps avant de prendre conscience du contact, le débutant passe par une période de frottement. Face à face on va tendre le poing en opposition afin que les avants-bras mis en contact soient frottés sur toute la longueur. Ce travail n’a pas seulement pour but de préparer au renforcement mais aussi de travailler le relâchement et la contraction lors du coup de poing. Ainsi on va pousser avec le pectoral et tirer avec le dorsal.
J’effectue l’exercice avec Patrick. Lionel passant par là nous dira: « c’est vrai, c’est fluide, mais il n’y a aucune puissance ».
Ce qu’il ne sait pas, c’est qu’à cet instant Patrick et moi avons créé un nouveau karate! Plus fort que le gôjûryû, plus fort que le gôgôryû…Plus fort que le karatedo: le 空手酒, de l’école 乱暴流 (appelé aussi ブウッリン流)… -_-‘
humouuuuuuuuur karatedo… karated’eau… karatesake…
désolé -_-‘
En fait une fois en opposition, nos avant-bras ne frottant pas vraiment nous sommes rester suffisamment longtemps à pousser comme des bourrins (et comme des ânes) pour ne plus rien avoir dans l’épaule pour la suite (dans mon cas).
On continue toujours en douceur par un exercice que j’affectionne pas vraiment (la raison pour laquelle Lionel m’utilise comme cobaye à ce moment) celui de mettre des claques sur les avant-bras de l’autre. Le but est de choquer les muscles mais sans la frappe destructrice d’un shuto ou d’un coup de poing mais avec une surface plus importante. Encore une fois celui qui baffe travaille aussi puisqu’il doit (pas « il peut » mais « il doit ») travailler le relâché dans les frappes en faisant intervenir tout le corps mais aussi varier l’intensité, les différentes générations d’énergie pour les baffes… et surtout le travail de l’alternance contraction/décontraction des pectoraux et des dorsaux. En plus ça endurcit la paume de la main.
Les avant-bras bien rouges, nous continuant sur un autre exercice. Ce qui peut se faire en haut, peut se faire en bas… du coup nous voilà partis sur une scéance de frotti-frotta au niveau des tibias. Pour l’épilation gratuite, il suffit de ne pas remonter sa jambe de pantalon, qui fait office d’abrasif. Un vrai régal pour les poilus! Tout à l’heure on mettait des baffes sur les avant-bras, et bien on va pouvoir faire la même chose sur les tibias.
Attaque mae-geri (tel qu’effectué lors de l’échauffement) et le partenaire varie les baffes sur les tibias en hauteur mais aussi sur les côtés. Son rôle à lui est toujours de rechercher un relachement des frappes avec intervention de tout le corps en entier. Ceux ne sont pas seulement les bras qui travaillent, mais tout le corps.
travail de la réception des low-kick
Quand on croit que c’est fini, ben y en a encore. On laisse souffler les tibias pour repasser aux avant-bras qui ont eu le temps de se reposer. La séquence sera toujours un travail en relachement en faisant participer tout le corps. Un en face de l’autre on effactue les différents blocages en opposition (on s’entrechoque les avant-bras en gros). C’est mon exercice préféré. Je profite d’une fatigue passagère du partenaire de Jean-Christophe pour aller croiser les bras avec lui. Je me suis bien entrainé les avant-bras et j’arrive à frapper des poteaux en bois à pleine puissance… et là… ben j’ai l’impression de frapper une barre en fer. Jean-Christophe n’est pas seulement fluide et souple, il est puissant et attrocement dur. Je déguste donc pendant les quelques minutes que durera l’exercice. Les avant-bras ne sont plus rouge mais écarlates…
Lionel nous montre petit à petit, très progressivement, très pédagogiquement les principes du combat dans la tradition okinawaienne des arts issus du Fujian. On repasse donc au travail des pieds. Frappe mawashi-geri le partenaire absorbe avec le tibia pour renvoyer l’attaque. Travail en absorption, ni trop tôt, ni trop tard, ni trop absorbés (dans ce cas on se fait balayer)… Bref un travail tout en sensibilité.
Pour montrer une autre des stratégies de combat, et l’intérêt du renforcement tendineux, Lionel nous fait effectuer des frappes de la jambe direct, doigts de pieds tendus. Il nous explique l’intérêt de ce type de frappe et surtout où les donner. Pour cet exercice on est censé les réceptionner dans les abdominaux… Je travaille avec Sandy et Jean-Christophe. On passe tous les deux un très mauvais quart d’heure. Jean-Christophe est puissant et ses frappes relachées passent largement la barrière abdominale. Et dire qu’il controle en plus. J’ose même pas imaginer ce qui se passerait s’il y mettait un peu plus de coeur.
travail des mains collantes
On permet aux orteils et aux abdominaux de se reposer en passant à un système très subtile de travail en sensation: le muchimi (en référence au muchi tengwa, une confiserie okinawaienne collante comme un caramel qui peut être déformé pour finalement revenir dans sa forme première): les mains collantes.
Bref, on essaye de sentir le mouvement de l’autre le dévier et créer chez lui un trou, et dès qu’il y a un vide, on le comble avec une baffe… évidemment le partenaire en fait autant et à nous de fermer les trous et d’éviter les baffes. Les élèves du maitre de l’ombre sont assez incroyable, on sent dans leur forme qu’ils y connaissent un rayon et ont l’habitude de ce type de travail. Ils brillent aussi par leur modestie et leur ouverture d’esprit.
On passe ensuite aux éducatifs pour les systèmes d’attaque, contre-attaque fluides. En effectuant des attaques basse, moyenne, haute, moyenne, basse puis basse, moyenne, haute, moyenne, basse, on effectue les 5 défenses vues en kote-kitae, avec un seul bras. Cet exercice, nous explique Lionel, a pour but de bien apprendre à relacher l’épaule pour gagner en vitesse, car l’adversaire utilise ses deux bras pour attaquer alors que nous n’utilisons qu’un bras pour défendre. De ce fait il faut non seulement relacher les techniques pour gagner en vitesse mais aussi rajouter un petit détail qui a son importance et que je n’expliquerai pas ici, compte tenu que je viens de le découvrir. Je travaille avec Patrick et on aura encore l’occasion de mettre en pratique les techniques sublimes et imbattables du karatesake (et non karate d’eau) bourrin-ryû. C’est ça aussi les stages, revoir des gens qu’on estime et qu’on apprécie, échanger ensemble et progresser ensemble.
Jean-Christophe(même s’il porte une ceinture blanche, il est 4ème dan de Kyokushinkai) et moi
On passe ensuite à une stratégie de combat introduisant un système ternaire. Le cerveau fonctionnant en binaire ce type de stratégie a pour but de dépasser le cerveau et le court-circuiter. Je ne détaillerai pas ce type de travail pour ne pas tout dévoiler dans le compte rendu… pour connaitre ce type de travail, il faut venir aux stages ^^
On mettra en application tous les éducatifs sous la forme de combats souples mais très cadrés. Il faut dans ce travail travailler le relachement et l’enchainement fluide, sans temps mort. Et continuer au sol si on y arrive et utiliser toutes les armes possibles. De ce fait, il convient de travailler doucement et d’accompagner. Pas de vainqueur, pas de perdant, mais un travail semi coopératif: on doit accepter quand ça rentre. Ca sera l’occasion de beaucoup tourner avec les divers participants… de voir à quel point je suis mauvais et à quel point je n’ai pas assez de pratique du combat. Il est vrai que jusqu’à maintenant j’ai toujours pratiqué un art dans un but culturel et traditionnel, au sens perpétuer les techniques, les katas, pratiquer dans un but purement culturel, de loisir, pour me faire plaisir. Maintenant je désire plus de contact, et donc l’apprentissage des combats est une chose bien à part et l’égo en prend souvent un coup. Mais bon, faut bien commencer un jour. Je me réjouis de rencontrer à nouveau des gens comme Jean-Christophe qui ont une expérience du combat et un talent indéniable, qui savent travailler avec vous en se controllant et vous permettent de progresser. La forme de corps de Jean-Christophe est destabilisante, un mélange de kyokushinkai et de taikiken, il cogne dur suffisament pour punir d’une erreur mais controle beaucoup. J’ose même pas imaginer ce que ça serait s’il appuyait vraiment!
Patrick, Raphael et moi
Lionel termine le stage par un explication des Oyos, des bukai de katas enchainés les uns aux autres pour former un combat à deux. Cela permet de donner une autre dimension aux pratiques des formes seules et on se retrouve dans l’applications martiales du kata avec tous les éléments nécessaires que l’on a travaillé jusqu’à maintenant: relachement, fluidité, travail de tout le corps.
Mon ami et Gruesque Sensei de son état, Lionel et moi
Bref, Un stage passionnant très enrichissant martialement qu’humainement. Il est juste à regretter qu’avec un tel thème le stage n’est pas durée plus longtemps pour permettre plus d’échanges avec plus de monde. J’ai regretté n’avoir pas pu échanger avec Alain, Steeve et Julien. Mais bon, on a échangé oralement, c’est déjà ça. Bref, 17 stagiaires pour ce stage c’est déjà une belle réussite, le tout sous la direction très pédagogique d’un Lionel passionné et motivé. Et que du beau monde!
Au final, je rentre avec de beaux hématomes aux avant-bras, qui s’estomperont rapidement les jours suivant, une motivation exacerbée et surtout des souvenirs pleins la tête ainsi que de nombreux exercices pédagogiques d’éducatifs pour la pratique du combat.
Les stagiaires moins un (celui qui prend la photo que je remercie)
Dans ces stages on croise vraiment du beau monde:
Raphael, ceinture noire de shôtôkan, d’aikido et actuellement pratiquant d’Uechi-ryû.
Patrick, ancien pratiquant de kyokushinkai avec Monsieur Setrouk, pratiquant de Grue Blanche avec Pascal Plée
Jean-Christophe, pratiquant de Kyokushinkai depuis 40 ans et de Taikiken (une légende veut que lorsque le dojo de kyokushinkai de Paris fut construit, Jean-Christophe était déjà là… et les mur furent montés autour de lui.
Alain ancien pratiquant de Uechi-Ryû Kenyukai (parmis les premiers élèves de maître Takemi Takayasu d’Aulnay sous Bois) et maintenant pratiquant/enseignant de savate défense
Et je ne parle pas du sensei, Lionel…
Pour ne citer qu’eux.